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Millicent,
Soeur Marie-de-Loyola (Amélie Leclerc) est née à
Trois-Pistoles le 14 juin 1900. Elle est décédée
à notre monastère d'Ottawa, le 10 septembre 1985.
La poésie
est une clarté, un rayon de soleil projeté sur les
symboles...
Le poète est la clef qui ouvre la porte sur un monde merveilleux...
Ce qui me ravit davantage et me hausse jusqu'à Celui qui
est la Beauté par essence,
c'est une langue très pure, cadencée, harmonieuse
et chaude, mais simple et dépouillée...
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Des
yeux d'enfant |
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C'est limpide et clair comme l'onde
Qui passe en chantant sur le roc.
Cela plonge comme une sonde
Et cela fouille comme un soc.
C'est franc, pur, étonné,
sincère
Et cela chante et cela rit.
C'est presque toujours en prière
Et toujours ça vous attendrit.
L'âme palpite tout entière
Dedans ces vases merveilleux,
Qu'on dirait pétris de lumière,
D'extase et d'amour radieux.
L'infini flotte en ces prunelles
Comme un jet d'ombre sur les eaux.
Les cils battent comme les ailes,
Les frêles ailes des oiseaux.
Ces yeux-là parlent d'innocence,
Leur flamme est pure comme un feu.
Le regard a la clairvoyance
Que n'ont pas toujours les vieux yeux.
Bruns ou noirs, bleus ou gris de brume,
Tous les yeux des enfants sont beaux,
Car ils ignorent l'amertume
Que la vie apporte en ses maux.
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Après
l'orage |
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Comme il fait bon après
l'orage!
Sur les vieux arbres rajeunis,
L'ondée a posé son vernis
Qui miroite dans le feuillage.
La terre absorbe lentement
Toute l'averse fécondante
Qui va gonfler le bon froment
Où palpite une vie ardente.
Demain, sur les sillons joyeux,
Tu verras les tiges superbes
S'offrir au soleil amoureux
Et promettre de lourdes gerbes.
O miracle du renouveau,
Bienfait de l'orage qui passe!
Il faut en bénir le Très-Haut,
Car la tempête est une grâce
Surtout pour notre cur humain
Qui redoute trop la souffrance :
L'orage est le moyen divin
De féconder notre existence.
Vraiment, si tu n'as pas souffert,
En vain s'exaltera ton rêve :
Ta vie est pareille au désert
Où jamais la moisson ne lève !
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La
nuit |
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Là-bas, le jour décline
à l'horizon vermeil,
Le silence grandit et l'ombre tend ses voiles,
C'est la nuit qui s'annonce et, narguant le soleil,
Le front du firmament se parsème d'étoiles.
Tout est calme dans l'air et le grand
bois muet
Offre ses bras chargés de feuilles odorantes
A la lune d'argent qu'il adore en secret
Et qu'il voudrait saisir de ses branches puissantes.
La tête sous son aile et rêvant
à l'azur,
L'oiselet fatigué, dans l'ombre se repose.
La fleur courbe sa tige et son calice pur,
Sur l'herbe, en se fermant, tout doucement se pose.
Dans les champs généreux,
le travail a cessé.
Les outils noirs et lourds s'endorment sur la terre.
L'homme, dans le repos, détend son corps lassé,
Et sa maison s'emplit d'une paix salutaire.
Et la nuit satisfaite en ce calme béni,
S'écoule lentement, imposante et sereine,
Tandis que les yeux d'or du firmament ravi
La regardent passer comme une Souveraine.
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Sur
le train |
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Les villages coquets défilent
tour à tour
Quelle fête est l'été sous la nue en dentelle!
La prairie a des fleurs à sa robe nouvelle
Et le vent lui murmure une chanson d'amour.
L'insecte vagabond folâtre avec
ivresse
Et l'on sent une vie intense s'agiter
Dans les herbes, dans l'air et dans l'immensité
Que de soleil ardent brûle de sa caresse.
Quel miracle géant que tout
ce renouveau
Après le grand sommeil dont a dormi la terre!
Par un bienfait sans nom, un étrange mystère,
Chaque été nous revient et plus jeune et plus
beau.
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